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Quand votre corps fait boum !
Brest. Salle Vauban. 21h30. Sur scène, deux types, Bum à
la batterie, torse nu un futte blanc, une perruque de plumes rouges
et une étrange ressemblance avec Tahiti Bob qu'on a connu
dans les Simpsons. A sa droite, Cello, tout de noir vêtu,
qui fait corps avec son violoncelle et devant lui toute une tripotée
de pédales (nous ne parlons pas du public mais des instruments
qui permettent de donner forme aux sons de cet instrument aux allures
si féminines.) Dans la fosse, un public ni trop ni peu nombreux,
juste ce qu'il faut pour mettre le feu aux tentures rouges d'une
salle que beaucoup d'artistes ont déjà piétiné,
que beaucoup considèrent comme imparable. Le son monte, emporté
par une basse chaude et un zouk s'improvise devant la scène.
Car Bumcello est comme ça, "polysonique", comme
beaucoup aujourd'hui, ils aiment mélanger, trifouiller, réactualiser.
Ce qui marque aussi chez Bumcello c'est l'économie, deux
instruments ni plus ni moins, mais bien placés, bien joués,
on reconnaît leur talent. Bum a une sacré batterie,
des cymbales à la pelle, des cloches et un bidon d'eau, tout
est percussion. Tout le monde à déjà marqué
le rythme sur n'importe quoi lors d'un repas plus ou moins arrosé,
mais Bum le fait mieux que nous. Cello caresse ses cordes, avec
ses doigts, avec son archer, il dompte une amazone, lui donne du
corps, parfois il pince les cordes, il fouette la peau, mais sans
violence, juste pour la faire crier de plaisir et cette chaleur,
cette hypnotisme gagne tout le public. Derrière, la batterie
accompagne, impose son rythme, se fait l'écho d'une transe,
d'une fête païenne où l'on prend du plaisir. On
croit parfois à des longueurs, ce ne sont peut-être
que des plaintes, des gémissements, des coït-interuptus
pour mieux repartir, pour que le plaisir ne s'arrête pas trop
vite.
Dans cette jungle de son, tout y passe dub, pop, hip-hop du rythme,
toujours du rythme et un invité surprise sorti du public,
monté sur scène, improvisant un ragga, Bumcello partage
son plaisir, il le partage avec ceux qui aiment ça. Et la
foule en redemande de cette orgie bon enfant, de cette orgie musicale,
les flots de son se chevauchent, se mêlent, transpirent, restent
en suspens, atteignent des vertiges que le public entend, comprend
et partage sans pudibonderie. Ce soir tous auront leur quart d'heure
de gloire, un quart d'heure qui dure, qu'on rappelle, qu'on redemande
et qui revient, deux fois ils reprendront leurs instruments. Pour
Bumcello le succès et le plaisir se montent à plusieurs,
sur scène et hors scène. Les acteurs ne sont plus
deux, mais des centaines, le public est lui aussi partie prenante
dans le rythme, il répond magistralement aux attentes du
groupe, hors proportion.
Car ce public le porte, le supporte, en redemande et le groupe
lui aussi revient à la charge, refuse de se retirer, comme
s'il ne voulait pas quitter une maîtresse formidable avec
laquelle il s'accorde si bien, si fort. A la fin, exténués,
l'invitation à les suivre le lendemain pour une autre séance
à Rennes est comme une déclaration d'amour, une envie
de remettre ça. Mais ce bonheur ne doit pas se répéter,
ou alors avec quelqu'un d'autre, de peur de gâcher des souvenirs,
des sensations que l'on ne connaît que la première
fois. Espérons pour eux et pour les rennais que l'expérience
fût aussi jouissive. En attendant, on les attendra pour leur
prochaine tournée, peut-être auront-ils sur scène
avec eux, un autre partenaire qui enrichira d'autant plus l'échange.
Jean Pierre Françoise
Nude for Love
Label : Tôt ou Tard.
Distribution: Warner
2002
"Booty Time"
Labe l: Signature
Distribution: Harmonia Mundi
2001
"Bumcello"
Label : Comet Record
Distribution: Discograph
{01 41 55 25 81 20}
1999 |
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